Peau de plumes
dès 3 ou 7 ans, tout public

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L'histoire

Félicien, le nounours de Josépha ne veut pas dormir ! Il est plongé dans la lecture d'un vieux livre. Il n'y comprend pas grand-chose car les pages sont toutes mélangées, les mots effacés... La jeune femme accepte de l'aider à déchiffrer l'ouvrage qui dévoile un récit captivant sur l'histoire des premiers hommes du pays de Payoumichlokvagozin. La lecture devient insolite. Josépha fait danser les pages comme des marionnettes, traduit les paroles en musique et se met à jouer les personnages. Félicien ne voudrait pour rien au monde que la nuit s'arrête...

Il était une fois un pays qui n'était que noir... Un vent se mit à souffler. Du vent sortit un chant, du chant sortit l'oiseau Nzourr qui engendra le ciel. Du fond de la terre, apparut une vieille femme, Ichouka, aux longs cheveux qui recouvraient ses yeux. Elle marchait sans rien voir et les traces de ses pas dessinaient des chemins. Elle fabriqua océans, montagnes et forêts. Nzourr vint à sa rencontre et l'invita à visiter le ciel. Il lui offrit une robe de plumes qui la rajeunit de cent ans. Elle se mit à danser jusqu'à ne plus pouvoir s'arrêter... Elle tomba dans un lac à l'eau bleue comme le ciel. Les plumes de sa robe se transformèrent en garçons et filles de toutes les couleurs. Un seul d'entre eux avait une peau couverte de plumes. Pour ne plus entendre les moqueries ni subir les coups des autres enfants, il s'enfuit dans la forêt. Il marcha longtemps, tenta de disparaître sous les feuillages épais. Puis il décida d'apprendre à voler. Il obtint l'aide de l'oiseau Nzourr dont il découvrit que c'était son père.

Peau de plumes réussit à transformer sa souffrance en énergie créatrice. Il dépasse sa peur et se découvre des qualités insoupçonnées. La liberté se conquiert par l'intégration des règles. Relier ciel et terre c'est concilier rêves et réalités.

L'origine du monde renvoie chacun à sa propre naissance et à sa nostalgie d'un paradis perdu. Peau de plumes finit par s'accepter dans sa double identité d'homme et d'oiseau

Fiche pédagogique

Le Mythe, retour sur nos origines

Nostalgie des origines

femme aux cheveux longs

Le mythe explique l'origine du monde de manière symbolique. Il fait ressentir un sentiment d'unité primordiale et permet à l'enfant de se relier au monde qui l'entoure. Toute naissance implique une séparation qui laisse le souvenir d'un paradis perdu. Subsiste le désir de réintégrer la matière, retourner à l'état où le nouveau né ne fait qu'un avec sa mère et éprouver un sentiment de béatitude absolue.

Le temps où hommes et animaux étaient frères

La surface de la peau du héros est plumes. Ses plumes comme des poils le renvoient à son origine animale. Les mythes d'origine parlent toujours d'un temps où hommes et animaux n'étaient pas différenciés et comment un jour ils se sont séparés. Ils nous rappellent la part animale qui est en nous et que nous tentons parfois si fort d'oublier ou de nier. Cette part d'instinct, l'enfant en est souvent plus proche que l'adulte. C'est pourquoi mythes et contes lui parlent directement.

Une naissance prodigieuse

Peau de plume grandit seul et ne découvre ses parents qu'à l'âge de 7 ans. L'abandon est une condition qui lui permet de se détacher de ses origines pour passer des épreuves, faire preuve de courage et acquérir une certaine autonomie. Mais c'est en retrouvant ses parents et en accédant pleinement à sa double identité d'humain et d'oiseau qu'il devient le héros fondateur du pays de Payoumichlokvagozin.

Bien que soumis à des situations dangereuses et menacé de mort, il possède des capacités surnaturelles qui lui permettent toujours de s'en sortir. A la fois faible et puissant, apparemment insignifiant au début et triomphant à la fin, l'enfant Peau de plumes confirme à quel point la vérité de ce que l'on est finit toujours par triompher.

L'enfant-oiseau si diffèrent, si proche

Un oiseau les ailes déployées

Comme tous les autres enfants, il est plume de la robe d'Ichouka transformée en petit garçon. Mais contrairement aux autres, il conserve la trace visible de son origine sur son corps. C'est ce qui dérange les autres enfants. Cette différence les renvoie à une partie cachée d'eux-mêmes. Peau de plumes affiche l'origine de tout être humain, il est homme et oiseau, il vient tant du ciel que de la terre, du monde de l'esprit que de celui de la matière. Ce n'est qu'en réalisant l'union des deux mondes que l'homme peut s'accomplir.

Apparence et image de soi

Les autres enfants renvoient à Peau de plumes une image dévalorisante. Qui est Peau de plumes ? Cette image que les autres lui renvoient de lui ou ce qu'il est profondément en lui-même ? La peau est une partie visible de soi en même temps qu'une frontière entre intérieur et extérieur de soi. Elle expose et protège à la fois.

L'enfant a besoin de ressembler aux autres, il cherche la normalité à tout prix pour obtenir l'agrément du groupe. Les ressemblances le rassurent. Il mesure et compare ses différences pour les ramener sans cesse à ce qu'il a de commun avec les autres.

L'épreuve de la diffèrence

Ses plumes source d'exclusion révèlent des capacités inespérées. Peau de plumes est traversé par plusieurs sentiments avant de prendre confiance en lui.

Ses réactions face à l'exclusion dont il est victime sont tour à tour le déni (il tente de rester dans le groupe en faisant comme si rien ne s'était passé), la colère (il voudrait riposter par une violence équivalente), la résignation (il réalise que seul contre tous il ne peut pas se défendre) et la honte (il veut se cacher dans la forêt, disparaître...). Puis vient le temps de la sublimation (il apprend à voler). D'abord désir de fuite, le vol s'avère au contraire l'occasion de se découvrir, de se confronter à des difficultés et de les dépasser. Ce n'est qu'en étant soi-même et en s'acceptant tel qu'on est, que l'on peut se faire accepter par les autres.

L'envol et la réalisation de soi

De tout temps, l'homme a aspiré à voler. Cette attirance traduit un désir d'élévation. Le vol incarne la liberté dans toutes ses dimensions physiques et psychologiques : s'affranchir d'un corps lourd qui limite, pouvoir prendre toutes les directions possibles, éprouver la sensation d'être au dessus du monde, ne faire qu'un avec l'espace tout entier, libérer l'énergie vitale... Voler suppose souplesse et harmonie. Pour acquérir les bons gestes, Peau de plumes suit les conseils de son père l'oiseau Nzourr. L'ascension signifie que l'enfant grandit en maturité et en sagesse. La liberté est toujours le résultat d'un dépassement de soi.

Livre et spectacle, deux représentations du conte

Paroles de la nuit

Dans les sociétés traditionnelles, le conte ne peut être dit que de nuit car sa parole est dotée d'une force magique qui ne doit pas se mélanger avec les paroles de la vie quotidienne. De même, Félicien choisit le moment de s'endormir pour lire le conte. Cette lecture se fond dans ses rêves quand Félicien s'endort vraiment et que Josépha continue de dérouler le fil de l'histoire. La nuit est propice à la rêverie. Rêve et conte ont tous deux pour fonction de déplacer des peurs, des préoccupations sur des images figurables.

La lecture devient spectacle

Félicien a dispersé les pages du livre aux quatre coins de la chambre. La lecture de Josépha devient voyage dans l'espace. Elle se met à jouer avec les images, puis revêt des masques pour mieux s'identifier aux personnages. Le masque l'invite à la danse.

Le lien qui se crée avec les livres est ludique. Il implique un jeu corporel qui suscite à son tour des images. Images du livre et images émanant du jeu de l'acteur se répondent et se nourrissent. Théâtre et lecture ont pour souci de faire vivre le conte.

L'histoire inscrite dans le livre a perdu le pouvoir de transformation puisqu'elle est comme figée dans le temps. Elle ne trouve une dynamique de mouvement que dans l'imagination du lecteur. Grâce au jeu de Josépha et de son nounours, le conte se remet en marche et cherche à renouer avec la tradition orale qui est en perpétuel mouvement.